YIFIXIA : Transformer les coproduits agricoles et agroalimentaires en molécules écoresponsables

La ChemTech : En quoi consiste l’innovation développée par votre entreprise ?

Nicolas Gaboriaud-Kolar : Yifixia est spécialisée dans la valorisation de coproduits (ou déchets) agricoles et agroalimentaires. Nous transformons des matières d'origine végétale, comme des peaux de fruits, des résidus de légumes ou des morceaux de plantes, en molécules d’intérêt. Ces molécules sont ensuite utilisées pour développer des ingrédients de formulation destinés au secteur cosmétique.

Le but est de permettre aux producteurs de cette filière d’intégrer des ingrédients « upcyclés » dont l’impact social et environnemental est positif. Cela contribue à une transformation des pratiques pour une industrie confrontée de plus en plus souvent à des interdictions ou des limitations de produits considérés comme nocifs.

Nous avons également une activité de bureau d’études, d’accompagnement, qui s’adresse aux entreprises agricoles et agroalimentaires soucieuses d’entreprendre des démarches sur ce plan dans un contexte de rentabilité. Notre objectif sur ce plan est de les faire avancer, de sorte qu’elles ne soient plus vues comme des producteurs de déchets mais comme des fournisseurs de matières premières.

La ChemTech : Comment est née cette offre de rupture ?

Nicolas Gaboriaud-Kolar : Ce projet a en bonne partie vu le jour en Grèce, au sein d’un laboratoire où j’ai travaillé il y a quelques années et qui valorisait les coproduits de la production d’huile d’olive et de vin.

Plus tard, une collaboration avec un centre R&D d'un grand groupe cosmétique m'a permis de constater la demande croissante du marché pour des ingrédients écoresponsables, en réponse aux nouvelles régulations.

La ChemTech : Comment décririez-vous le potentiel de cette innovation ?

Nicolas Gaboriaud-Kolar : Les développements possibles sont immenses, car les coproduits agroalimentaires et agricoles exploitables constituent une mine de ressources disponibles en grandes quantités et éco-responsables, capables de s’inscrire dans la perspective des développements industriels d’avenir.

Nous nous sommes concentrés sur le secteur cosmétique dans un premier temps, mais les champs d’application sont en réalité très vastes. L’agroalimentaire, la nutraceutique, la parapharmacie, les biomatériaux sont autant de domaines qui recherchent des solutions  éco-responsables, pour remplacer des additifs et molécules de plus en plus réglementés et dans le cadre du développement de leur politique RSE.

La ChemTech : Yifixia est définie comme une entreprise à impact. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

Nicolas Gaboriaud-Kolar : Nous sommes une organisation de l’économie sociale et solidaire. Au-delà de l’offre innovante prometteuse que nous avons développée, notre objectif est de soutenir trois grands piliers essentiels :

• La distribution de la valeur ajoutée : 50 % de nos bénéfices sont réinvestis dans  l’entreprise pour acheter du nouveau matériel, augmenter les salaires, payer nos fournisseurs de façon juste et équitable. En matière de distribution du pouvoir, nous mettons également en place une gouvernance partagée dans l’entreprise, profitable à tous les salariés, dans laquelle chaque voix compte de la même manière.
• La protection de l’environnement : en cohérence avec notre positionnement, nous avons par exemple banni au sein de l’organisation l’ensemble de la pétrochimie, en privilégiant uniquement les principes de la chimie verte et de la chimie blanche, pour réduire au maximum l’impact environnemental de notre activité. Nous bénéficions d’ailleurs du label « Entreprise engagées pour la nature », délivré par l’OFB (Office français de la biodiversité).
• La mise en place d’un modèle économique à une échelle régionale : notre objectif est de créer un modèle réplicable dans d’autres territoires et non une filière qui implique l’acheminement de volumes gigantesques de coproduits à l’échelle internationale, avec des transports sources d’importantes émissions de CO₂.